vendredi 19 août 2011

Il faut savoir payer l’impôt de son savoir

زَكَاةُ العِلْمِ نَشْرُهُ


soit :
zakātu l ‘ilmi nachruhu

c’est-à-dire :
Il faut savoir payer l’impôt de son savoir

attribué à Ibn-Qutayba إِبن قُطَيْبَة

ce qui s'interprète par : le savant, l'érudit, celui qui a eu la chance de faire ses humanités, doit en faire bénéficier son prochain.


Une maxime éclairée par la biographie de son auteur, polygraphe sunnite du IXe siècle, né en 828 en Irak à Kūfa   الكوفة, mort en 889 à Baghdād  بغداد.
Ayant reçu une bonne formation dans les diverses sciences musulmanes, Ibn-Qutayba est qāḍī de Dīnawār, passe peut-être par le tribunal de la répression des abus (maẓālim) à Baṣra, puis se fixe à Baghdād, où il se consacre à l'enseignement jusqu'à sa mort.
Ce lettré est d'abord un écrivain d'adab أَدَب, terme qu'on pourrait risquer de traduire par « humanités musulmanes » (c'est un ensemble de connaissances intellectuelles, religieuses, morales et pratiques que doit posséder un croyant bien formé).
Ibn-Qutayba écrit le Kitāb adab al-kātib  كِتَاب أَدَب الكَاتِ, sur la formation philologique du bon secrétaire, ainsi qu'un autre livre sur la poésie et les poètes, sur les sources des récits traditionnels. Il est aussi théologien, mais un théologien qui reste toujours un adīb, pratiquant l'adab [Adib est un prénom de langue arabe composé sur le mot adab qui signifie. sage, cultivé, lettré]. Il compose des ouvrages sur les divergences dans le ḥadīth et sur le Coran : commentaires des passages difficiles, études rhétoriques, etc.
[source : Encyclopédia Universalis]

Note 1 : L’adab couvre à la fois la manière de vivre, de se vêtir, de manger et, de façon générale, de se comporter. Par extension, il est devenu synonyme de « politesse », « courtoisie » et de « bonne éducation » mais aussi de « raffinement » ou encore de « culture » voire de « belles lettres » (suite à l’abondante littérature dont l’adab a fait l’objet).
[source : Wikipédia]

Note 2 : L'esprit intellectuel qui soufflait de ce côté-ci du monde, à cette époque, est décrit par Charles Pellat (1914-1992), dans l'article d'Arabica en ligne "La prose arabe à Bagdad" : "Le premier devoir des écrivains qui sont attentifs aux besoins de la communauté dans laquelle ils vivent et soucieux de former son esprit et son goût, est d'effectuer un choix et de présenter a leurs contemporains, désireux de se cultiver sans se perdre dans les détails inutiles ou secondaires, une synthèse suffisamment riche et intelligente pour ne pas limiter l'horizon, tout en offrant 1'essentiel. Si la culture est ce qui reste quand on a tout oublié, à Bagdad elle est ce qui reste quand on a éliminé volontairement 1'accessoire." 
Charles Pellat est amené a nuancé fortement l'apport du lettré de Koufa : "Ibn Qutayba est loin de posséder 1'ouverture d'esprit et le style de son prédécesseur ; c'est pourtant lui qui fixe les limites de la culture générale, en en restreignant le champ, tout en cherchant, semble-t-il, à développer sa composante religieuse."
(sur Charles Pellat, grand arabisant et islamologue reconnu, lire l'allocution prononcée après son décès par l'Académie des Inscriptions et Belles-lettres.)

Note 2 : Les Arabes ont attendu la fin du xixe siècle pour attribuer au mot adab le sens de littérature et signifier ainsi que leur production allait souscrire à des normes devenues peu ou prou universelles [source : article Monde arabe / Littérature, Encyclopédia Universalis]

Note 3 : Koufa ou Kûfa (الكوفة [al-kūfa])  La ville devint au milieu du VIIIe siècle, la capitale de Abbassides en attendant la construction de Bagdad. Actuellement, Koufa reste un centre important d'étude, c'est là que s'est développée la calligraphie arabe et le premier style d'écriture arabe, issu du syriaque ancien : le style coufique, un siècle avant la fondation de la ville de Koufa.

Folio de Coran en style kufi, encre, couleur et or, XIe siècle, Iran (source Wikipédia)

Ibn-Qotaiba nous amène à un excellent blog d'arabe bilingue, avec de nombreux textes vocalisés.

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